162 A. XXXIII. Dopisy Karla ze Żerotina
plus déliberé de m'en ressentir aultrement, encores qu'au commencement, quand
liniure esté fraiche, i'en eusse faict par adventure quelque demonstration, si ie
n’eusse esté retenu par l’artifice d’un mien ami, lequel craignant, ainsi que ie pense,
de me mettre en danger, m’a consulté aultrement que ne comporte la corruption
de ce monde. Ce qui greve le faict, c'est que dès ce pas, il est allé porter ceste
bonne nouvelle à l'empereur, lequel l’a eue aggréable, ainsi que la pluspart des
domestiques et plus proches en rend tesmoignage, bien que d'aucuns di[s]ent le con-
traire, ausquels ie n'aiouste *) pas beaucoup de foy. Si cela me cuit, vous le pouvez
considerer, connoissant mon naturel; mais ie le porte d’aultant plus patiemment,
que ie suis tres certain qu'il n’avvient à l’homme ni bien ni mal sans la volonté
et permission de Dieu, à laquelle il fault plier le genouil.
Mais ce n’est pas tout: car d’aultre costé ie suis tant perseeuté de mes
cnnemis, lesquels soubs l'autorité de l'empereur cerchent ma ruine totale, que si
Dieu ne me preserve de sa grace, ie me tiens pour perdu, puisque ceus qui doivent
estre mes iuges, sont plus envenimés contre moy [...] tenir hardiment que l'acteur
mesme, outre que de tout temps ils ayent esté mes plus aspres ennemis. Les
charges qu'on me donne ouvertement, ne: sont pas de trop grand'importange, mais
le crime qu'on n'impose en secret, est que ie coniure avec vostre maistre contre
l'empereur et que ie çerche de le faire roy de Boheme, chose à laquelle ni luy ni
moy ne pensames onques; mais ainsi fault il que les enfans du père de mensonge
se servent de ses traits et en défault de vérité facent iouir et valoir les faulssetés
et calomnies. Je mie suis presenté desia deusfois au iugement, mais la chose a tous-
iours esté remise et m'a-t-on à ceste derniere fois nommé terme pour le 24. de
May, auquel ie seray tenu de respondre ct le feray avec laide de Dieu tellement,
que la response faira apparoistre à tous mon innocence.
Outre cela pour m’achever de peindre, comme l'on dict, on m'a déposé de
l'administration dela tutele du ieune baron de Leip, lequel i'ay esté contrainct de rappeller
de Strassbourg. et comme il sera venu, le dois présenter en court, en. laquelle comme
il sera nourri, le verront ceus-là ausquels Dieu faira la grâce de vivre. Voilà l'estat,
auquel ie me trouve maintenant, avec tout que ie passe beaucoup d'aultres choses
qui ne me laissent l'ame trop en repos, n'avant aultre consolation sinon en l’espérance
de l’aide de Dieu ct en Dieu et en la benediction que Dieu donne à mes filles,
puisque le fils — si vous ne le scavez — est allé suivre sa mère.
Aultre chose n’ay à vous escrire, sinon qu’ Andréas, que vous cognoissez,
m'à prié de vous raccommander ce sien fils, lequel il envoye en Allemagne pour
çercher maistre. Si vous trouvez qu'il soit propre pour vostre service, ie vous prie
au nom de son père de le retenir; si vous n’en avez faulte, au moins de luv
adresser quelqu'un qui le veuille prendre pour serviteur. Qui sera l’endroit qu’après