16 A. XXX1II. Dopisy Karla ze Žerotína
bonté, de meriter ou, en quelque sorte que ce soit, d'obtenir pardon, puisqu'ainsi
est que ic may failli que par une certaine asseurance en icelle. Toutesfois si tant
est que ce retardement vous ait offensé plus que ie n'eusse estimé, et que la per-
suasion eue de vostre douçeur et humanité ne doive rien diminuer de ma faulte,
ie me confesse entièrement coulpable, vous suppliant aussi d'avoir moins d'esgard
à la qualité d'icelle, qu'à ceste mienne franche et volontaire recognoissance. En
esperance de quoy et pour respondre finalement à vostre dicte lettre, ie ne veulx
manquer de vous remercier aultant humblement que ie puis de l'honneur quil vous
plaist me faire, monstrant une telle confiance en mon endroit, que de vous daigner
servir de moy et de mes moyens. Et quand ie n'auroy esgard à infinies aultres
raisons qui me pourroyent esmouvoir à vous faire le service que ie vous doy,
pourtant de biens honneurs et faveurs reçeus en vostre ville si longtemps et par
tant de fois, ceste seule seroit suffisante à me contraindre de faire tout effort pour
vous complaire. Mais ie me puis à bon droit plaindre de mon malheur, veu qu'ayant
la volonté très prompte et totalement enclinée à çe que désirez, ie ne puis pour çela
movennez que les effets y correspondent. Car comme ainsi soit que par le passé
ie me soy trouvé avoir quelque peu de moyens, lesquels, s'il vous cust plen declarer
des lors vostre necessitć, aussi bien qu'avez faict à présent, je n'eusse aucunement
espargné pour vous en servir, ainçois m’eusse estimé trés heureulx. et trés. honnoré
(les les employer en si bon endroit et pour si iuste cause. Néantmoins ayant depuis un
an en ça, tant pour le service du roy très-chrestien, que pour mes affaires parti-
culitres et singulièrement au voyage de Françe, que i'entreprends maintenant pour
la seconde fois, faict une despence tres grande, très grande, di-ic, au regard de
mon petit pouvoir, combien qu'en soy mesme elle soit petite, ie me trouve tellement
espuisé, que quand ie me vouldroy incommoder pour vous accomoder, ic ne le
scauroy faire. Il m'est impossible d'exprimer le desplaisir que ie sens de me veoir
perdre une si belle occasion de vous gratifier, ou plustost n'avoir aucun moyen de
la pouvoir embrasser à fin de vous monstrer, combien ie suis acquis tant à vous,
messieurs, en particulier, qu’au général de vostre republique, et combien ie désire
de faire paroistre le bon gré que i'ay à la ville de Geneve, en laquelle i'ay esté
accueilly et traittó si gracieusement. Messieurs Dalbani entre aultres, qui sçavent
à peu prés que c'est que de mes affaires, me peuvent rendre ample tesmoignage
tant de l’affection que i'ay tousiours eue à vous servir que du peu de moyen que
Тау à présent de vous en faire voir les effects. Je m'en rapporte à iceulx et m'as-
seure que leurs paroles se trouveront conformes aulx miennes, par lesquelles pourrez
comprendre aisément, que mes escuses ne sont point frivoles ou controuvées à plaisir,
ains plus que véritables. Qui me faict vous prier bien humblement de les tenir
pour telles et prendre en gré la volonté qui est et sera tousiours prompte à vous